lundi 31 décembre 2012

6ème Français Séquence Transformation 6ème séance synthèse


Séquence Transformation et identité

Séance 6

Objectif : Composer une synthèse de lecture analytique

Supports : Textes d’Ovide et de La Fontaine

Il s’agit ici d’apprendre aux élèves à mettre en perspective les différents textes étudiés dans cette séquence. En utilisant une approche comparative, ils dégageront les similitudes et les contrastes dans la façon de décrire une métamorphose (thème de la séquence) et approfondiront leur réflexion par le corollaire de celle-ci, le thème de l’identité.

Pour cette dernière séance il me semble judicieux de faire travailler les élèves en petits groupes pour que leur réflexion naisse du débat et de l’échange d’idées sur les questions proposées. De la même façon, une synthèse écrite sera travaillée de façon collective au tableau.


Activités d'écriture:

Relisez les notes de votre cahier sur les réponses aux questions de lectures des séances 2 et 3.
Pour répondre à ces questions, discutez entre vous pour échanger vos points de vue et rédigez une réponse collective. Un « secrétaire » par groupe prendra des notes sur une feuille. Utilisez le dictionnaire si besoin est. 

  1. Dans quelles conditions Daphné et la Grenouille subissent-elles leur transformation ? En sont-elles responsables de la même façon ?
  2. Décrivez l’identité de ces 2 personnages avant et après leur changement. Leur condition est-elle différente? en bien ou en mal ? Pourquoi ?
  3. Quel sens donnez-vous à ces 2 transformations ?


(Pour la correction de ces questions, ne pas imposer le point de vue de l’enseignant si leurs réponses sont justifiées et argumentées ! Cela étant, il est possible de les guider si des difficultés apparaissent pour trouver des réponses):

  1. Daphné se transforme en laurier à la suite d’un combat amoureux avec Apollon, en essayant de lui échapper. Sa transformation est imposée par la situation dans laquelle elle se trouve. La Grenouille au contraire décide de se transformer alors que rien ne l’y oblige. Elle est responsable de son destin : la mort.
  2. Avant sa métamorphose, Daphné la nymphe est une jeune femme dont la beauté séduit Apollon. Après sa transformation, elle passe de l’humain au végétal puis au stade divin, grâce au pouvoir d’Apollon. Sa beauté est transcendée de façon immortelle par l’amour du dieu Apollon, on peut considérer que son sort s’est amélioré au regard de l’importance du divin dans l’époque de l’Antiquité (donner d’autres exemples aux élèves). Ce n’est pas le cas de la Grenouille, elle était animale, elle essaie de ressembler à un autre animal et meurt. Elle n’est donc plus rien physiquement parlant. Et spirituellement, ce n’est guère plus reluisant puisque La Fontaine fait un parallèle avec une morale humaine où elle est ridiculisée.
  3.  La métamorphose de Daphné consacre la victoire du sentiment amoureux et de l’éternité sur la beauté physique et le temporaire. La métamorphose manquée de la Grenouille donne lieu à une morale de La Fontaine dont il est coutumier à travers ses fables : la Grenouille est mise en parallèle avec un bourgeois qui désire s’élever socialement pour changer de statut et donc d’identité. D’ailleurs c’est bien pour se moquer des bourgeois de son temps que La Fontaine a recours au subterfuge de la Grenouille. Dans le texte d’Ovide, l’être humain est donc sublimé par le sentiment amoureux qu'il  incarne. Dans celui de La Fontaine, il est au contraire avili par son sentiment d’avidité et de fatuité, à l’image d’une vulgaire grenouille qui crève de son ambition dévorante. 

6ème Français Séquence Transformation séance 5 dictée


Séquence Transformation et identité


Séance 5


Objectif : Dictée sur les adjectifs qualificatifs et les temps de l’imparfait et du passé simple

Support : La métamorphose, de Franz Kafka

Il s’agit ici d’entraîner les élèves à la correction orthographique par un exercice de dictée qui revient régulièrement dans chaque séquence. Les Instructions Officielles pour le français au collège stipulent que « la dictée de contrôle est une modalité indispensable d’évaluation de la compétence orthographique ».

Extrait (début de la nouvelle):

En se réveillant un matin après des rêves agités, Gregor Samsa se retrouva, dans son lit, métamorphosé en un monstrueux insecte. Il était sur le dos, un dos aussi dur qu’une carapace, et, en relevant un peu la tête, il vit, bombé, brun, cloisonné par des arceaux plus rigides, son abdomen sur le haut duquel la couverture, prête à glisser tout à fait, ne tenait plus qu’à peine. Ses nombreuses pattes, lamentablement grêles par comparaison avec la corpulence qu’il avait par ailleurs, grouillaient désespérément sous ses yeux. […]

Le regard de Gregor se tourna ensuite vers la fenêtre, et le temps maussade – on entendait les gouttes de pluie frapper le rebord en zinc – le rendit tout mélancolique. « Et si je redormais un peu et oubliais toutes ces sottises ? » se dit-il ; mais c’était absolument irréalisable, car il avait l’habitude de dormir sur le côté droit et, dans l’état où il était à présent, il était incapable de se mettre dans cette position.

Quelque énergie qu’il mît à se jeter sur le côté droit, il tanguait et retombait à chaque fois sur le dos. Il dut bien essayer cent fois, fermant les yeux pour ne pas s’imposer le spectacle de ses pattes en train de gigoter, et il ne renonça que lorsqu’il commença à sentir sur le flanc une petite douleur sourde qu’il n’avait jamais éprouvée.

Barème :
Verbes à l’imparfait et au passé simple : 22 verbes x 0,5 = 11 points
Adjectifs qualificatifs : 13 X 0,5 = 6,5 points
Qualité d’ensemble : 2,5 points
Total = 20 points

6ème Français Séquence Transformation 4ème séance

Séquence Transformation et identité 

Séance 4


Il s’agit ici d’une étude de la langue qui sera prolongée par une activité d’écriture et d’application grammaticale (adjectifs qualificatifs, utilisation imparfait / passé simple). L’objectif est ici d’analyser les conditions d’utilisation de l’imparfait et du passé simple dans le récit. La séance se fera là encore si possible en salle d’informatique ou au CDI.


Objectif : Analyser en quoi les temps grammaticaux participent au rythme de l’action dans le récit

Support : Extrait du conte « La Barbe Bleue » de Charles Perrault

Bravant l'interdiction qui lui était faite, la femme de Barbe Bleue entre dans le cabinet de son mari et découvre des corps de femmes baignant dans leur sang. Apeurée, elle laisse tomber la clé du cabinet dans une flaque de sang. A son retour, Barbe Bleue s'en rend compte et décide de tuer sa femme.

Texte:

 « Il faut mourir, madame, lui dit-il, et tout à l’heure.
— Puisqu'il faut mourir, répondit-elle en le regardant les yeux baignés de larmes, donnez-moi un peu de temps pour prier Dieu.
— Je vous donne un demi-quart d’heure, reprit la Barbe bleue ; mais pas un moment davantage. »
Lorsqu'elle fut seule, elle appela sa sœur, et lui dit
« Ma sœur Anne, car elle s’appelait ainsi, monte, je te prie, sur le haut de la tour pour voir si mes frères ne viennent point : ils m’ont promis qu'ils me viendraient voir aujourd'hui ; et si tu les vois, fais-leur signe de se hâter. »
La sœur Anne monta sur le haut de la tour ; et la pauvre affligée lui criait de temps en temps :
« Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ? »
Et la sœur Anne, lui répondait :
« Je ne vois rien que le soleil qui poudroie, et l’herbe qui verdoie. »
Cependant, la Barbe bleue, tenant un grand coutelas à sa main, criait de toute sa force à sa femme :
« Descends vite ou je monterai là-haut.
— Encore un moment, s’il vous plaît », lui répondait sa femme.
Et aussitôt elle criait tout bas :
« Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ? »
Et la sœur Anne répondait : « Je ne vois rien que le soleil qui poudroie, et l’herbe qui verdoie.
— Descends donc vite, criait la Barbe bleue, ou je monterai là-haut.
— Je m’en vais », répondait la femme et puis elle criait :
« Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?
— Je vois, répondit la sœur Anne, une grosse poussière qui vient de ce côté-ci…
— Sont-ce mes frères ?
— Hélas ! non, ma sœur : c’est un troupeau de moutons…
— Ne veux-tu pas descendre ? criait la Barbe bleue.
— Encore un moment », répondait sa femme, et puis elle criait :
« Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?
— Je vois, répondit-elle, deux cavaliers qui viennent de ce côté, mais ils sont bien loin encore.
— Dieu soit loué ! s’écria-t-elle un moment après, ce sont mes frères ; je leur fais signe tant que je puis de se hâter. »
La Barbe bleue se mit à crier si fort que toute la maison en trembla. La pauvre femme descendit, et alla se jeter à ses pieds tout épleurée et tout échevelée.
« Cela ne sert à rien, dit la Barbe bleue ; il faut mourir. »

( Lecture du passage en silence par les élèves puis à l’oral, si possible un garçon et 2 filles pour jouer les rôles de Barbe Bleue, de sa femme et la sœur de celle-ci, Anne. Essayer de leur faire adopter un ton approprié pour chaque personnage)

Questions d’étude de la langue :

  1. Relisez le passage de la ligne 9 (« La sœur Anne monta… ») jusqu'à la fin. Repérez les verbes aux temps différents du présent (ce temps a déjà été étudié lors d’une séquence en début d’année scolaire) et soulignez-les. De quels temps s’agit-il ?
  2. Plusieurs phrases et plusieurs verbes sont répétées dans ce passage. Relevez-les et indiquez le sens que vous donnez à ces répétitions.
  3. Quel est le temps utilisé dans cette répétition ? Quel peut-être la valeur de ce temps ?
  4. Observez maintenant les trois dernières lignes de l’extrait. Quel est le temps utilisé ? Quel type d’actions est représenté ici ? Quel peut-être la valeur de ce temps ?


Réponses :

  1. Monta / criait / répondait / criait / répondait / criait / répondait / criait / répondait / répondit / criait / répondait / criait / répondit / s’écria / se mit / trembla / descendit / alla / : imparfait et passé simple
  2. Les verbes à l’imparfait sont répétés de nombreuses fois. Il y a aussi ces phrases : Anne, ma sœur Anne ne vois-tu rien venir ? et la soeur Anne répondait et aussi descends vite ou je monterai là haut. Ces répétitions se font écho les unes aux autres. La répétition sert ici à renforcer le sentiment de panique de la femme de Barbe Bleue (sa question lancinante à sa sœur Anne), à renforcer l’absence de solution de la sœur Anne (sauf à une reprise où elle utilise le passé simple, ligne 22 parce qu'elle voit enfin quelque chose, l’effet est de créer la surprise chez le lecteur mais c’est encore un faux espoir qui va donc renforcer l’absence de solution de la jeune femme). Quant à la phrase de Barbe Bleue, elle renforce le sentiment de menace qui pèse sur la jeune femme.
  3. L’imparfait est souvent utilisé lors de ces répétitions. Il s’agit d’indiquer des actions qui durent dans le temps, un scénario qui tourne en boucle sans qu'aucune solution n’apparaisse pour la jeune femme. Le temps s’étire en longueur alors que l’heure tourne et que l’ultimatum du demi quart d’heure laissé par Barbe Bleue à la jeune femme va bientôt expirer.
  4. Dans les trois dernières lignes, c’est le passé simple qui est utilisé : après le cri surpuissant de Barbe Bleue, le cours du récit s’emballe, les actions brèves s’enchaînent. La fin est proche.


Sur l’ordinateur, prolonger à nouveau la séance par la consultation du site de grammaire en ligne de Magnard :  http://www.grammaire-college.fr/

Lorsque la séance est terminée, distribuer une photocopie de la règle de grammaire sur l’imparfait et le passé simple que les élèves colleront dans leur cahier / ou alors faire une sortie imprimante de la règle depuis le site internet en indiquant bien la source du document sur le cahier !

  • Travail à faire à la maison et évalué : (laisser une semaine)


Imaginez une suite et une fin à ce passage :  Il devra mettre en scène une métamorphose du ou des personnages et vous devrez veiller :
  • à utiliser des adjectifs qualificatifs appropriés
  • à employer des verbes principalement à l’imparfait et au passé simple


Barème :
Pertinence d’utilisation des adjectifs : 7 points
Pertinence d’utilisation des temps grammaticaux : 7 points
Correction de l’orthographe : 3 points
Logique dans l’enchaînement des actions : 3 points


  • Pour la prochaine séance, leur demander de revoir les exercices sur les adjectifs qualificatifs et d'apprendre ou de revoir les conjugaisons de l'imparfait et du passé simple sur leur manuel scolaire, en vue d'une dictée.


dimanche 30 décembre 2012

6ème Français Séquence Transformation 3ème séance


Séquence Transformation et identité

Séance 3

Objectif d’étude de la langue : Examiner comment les adjectifs qualificatifs se mettent au service d’une transformation

Support : Fable La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf, de Jean de La Fontaine

Cette fable courte se prête bien à l’étude des adjectifs qualificatifs. Peu de problème de compréhension mis à part quelques termes qu'il convient d’expliquer aux élèves. Les adjectifs qualificatifs utilisés sont simples et parlants aux élèves d’une classe de Sixième : belle / grosse / envieuse/ chétive / sages / grands / petit
Les questions d’étude de la langue que j’ai choisies amènent (par une démarche inductive) les élèves à prendre conscience de l’importance des adjectifs pour le sens de la fable et de leur fonctionnement grammatical. Ils doivent normalement parvenir à formuler eux-mêmes la règle de l’accord des adjectifs en genre et en nombre avec le nom.
Prévoir cette séance en salle d’informatique pour la 2ème  partie des activités où les élèves doivent répondre aux questions sur un site de grammaire en ligne.

Texte :

La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf

Une Grenouille vit un Boeuf 
Qui lui sembla de belle taille.
Elle, qui n'était pas grosse en tout comme un oeuf,
Envieuse, s'étend, et s'enfle, et se travaille,
Pour égaler l'animal en grosseur,
Disant : "Regardez bien, ma soeur ;
Est-ce assez ? dites-moi ; n'y suis-je point encore ?
- Nenni. - M'y voici donc ? - Point du tout. - M'y voilà ?
- Vous n'en approchez point. "La chétive pécore
S'enfla si bien qu'elle creva.
Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages :
Tout bourgeois veut bâtir comme les grands seigneurs,
Tout petit prince a des ambassadeurs,
Tout marquis veut avoir des pages.

notes :
Pécore: Mot qui vient de l’italien "pecora", qui signifie: brebis. Il désigne à l'époque une femme stupide.
Pages: jeunes nobles qui étaient au service des rois et des princes pour leur service 

1ère étape :
Lecture à l’oral de la fable par l'enseignant (puis d'un élève volontaire) et explication collective

En introduction à la partie Etude de la langue, à l’oral : demandez aux élèves ce qu'est un adjectif qualificatif (insister sur qualificatif en prononçant ce mot). Ils doivent normalement dire qu'il qualifie un nom. 

Questions (activité écrite) :
  1. Relisez attentivement la fable de La Fontaine et soulignez au crayon à papier les adjectifs qualificatifs.
  2. Indiquez sur la même ligne de la fable à quel nom chaque adjectif renvoie.
  3. Y a-t-il un champ lexical qui se dégage de la plupart de ces adjectifs ?
  4. En quoi ce champ lexical est-il important ? Quel est le rôle de ces adjectifs alors ?
  5. Tous les adjectifs sont-ils au singulier ? Si la réponse est non, lesquels sont au pluriel et pourquoi ?
  6. Voyez-vous d’autres différences entre ces adjectifs en fonction des noms auxquels ils renvoient ? (masculin, féminin)
  7. Que pouvez-vous alors en déduire sur l’accord de l’adjectif avec le nom ? 
Réponses :
  1. Belle : taille / grosse : grenouille / envieuse : grenouille / chétive : pécore / sages : gens /
  2. Grands : seigneurs / petit : prince
  3. Champ lexical de la corpulence (belle, grosse, chétive, grand, petit).
  4. Ce champ lexical est important dans la mesure où certains adjectifs s’opposent grosse / chétive  et grands / petit pour indiquer un fort contraste entre la grenouille et le bœuf, entre les bourgeois et les seigneurs. Ces adjectifs renforcent donc ces inégalités.
  5. Sages et grands sont au pluriel (S final) car ils s’accordent avec gens et seigneurs.
  6. Belle (féminin de beau) renvoie à la taille, grosse (féminin de gros : leur faire observer le doublement de la consonne finale  et leur demander de deviner pourquoi), chétive, féminin de (leur faire trouver) chétif.
  7. L'adjectif s'accorde en genre et en nombre avec le nom auquel il se réfère.

Remplissez ce tableau en complétant les cases avec les adjectifs qui manquent


Passer dans les rangs pour repérer les élèves en difficulté et pointer du doigt les mauvaises réponses.
Utiliser le rétroprojecteur / vidéoprojecteur pour qu’ils en vérifient la correction.

Sur l’ordinateur, prolonger la séance d’étude de la langue par la lecture de la leçon sur les adjectifs qualificatifs et des exercices d’application sur l’excellent site de la Grammaire Magnard en ligne :

Lorsque la séance est terminée, distribuer une photocopie de la règle de grammaire sur les adjectifs qualificatifs que les élèves colleront dans leur cahier / ou alors faire une sortie imprimante de la règle depuis le site internet en indiquant bien la source du document sur le cahier !

Ce type d’activités en ligne, par son côté ludique (les élèves peuvent surligner au fluo, notamment) doit être favorisé pour les séances d’étude de la langue notamment. Cela permet d’atténuer le côté rébarbatif que peut avoir la grammaire aux yeux de certains élèves.
Cependant il est à noter qu’il faut s’abonner pour avoir accès à ce site.



samedi 29 décembre 2012

6ème Français Séquence Transformation 2ème séance


Séquence Transformation et identité

Séance 2 :

Objectif de lecture analytique: Analyser un sentiment amoureux entre un dieu et une nymphe.

Support : Extrait des Métamorphoses d’Ovide : Apollon et Daphné

Texte :

Cependant Apollon aime : il a vu Daphné  et il veut s’unir à elle. Le dieu espère qu’il va obtenir ce qu’il désire : espérance vaine ! […]
Il contemple les cheveux de la nymphe flottant négligemment sur ses épaules.
— Et que serait-ce, dit-il, si elle prenait soin de sa coiffure ?
Il voit ses yeux briller comme des étoiles ; il voit sa charmante petite bouche, mais il ne lui suffit plus de la voir ! Il admire ses doigts, ses mains, ses poignets et ses bras presque nus. Ce que le voile cache à ses yeux, son imagination l'embellit encore davantage.
Mais Daphné fuit, plus rapide que le vent, et c'est en vain qu'Apollon cherche à la retenir par ses discours :

— Chère nymphe, fille de Pénée, je t'en prie, arrête ! ce n'est pas un ennemi qui te poursuit ! Arrête, Daphné, arrête ! […] Ah ! de grâce, modère ta vitesse, je t'en supplie, ralentis ta fuite, et je ralentirai moi-même mon ardeur à te suivre. Apprends au moins à reconnaître celui qui t'aime. […] Jupiter est mon père. Je suis le maître de l'oracle : ma bouche dévoile aux mortels l'avenir, le passé et le présent. Je suis le maître de la musique : les hommes me doivent l'art d'unir aux accents de la lyre les accents de la voix. Mes flèches sont redoutables : elles parviennent au but à tous les coups. Hélas ! il en est une plus redoutable encore qui m'a transpercé le cœur. Je suis l'inventeur de la médecine : le monde entier m'honore comme un dieu secourable et je connais parfaitement toutes les plantes dont on tire des remèdes. Mais en existe-t-il une qui guérisse du mal d'amour ? Mon art est utile à tous les hommes, mais, hélas ! il est impuissant pour 
moi-même !

Le dieu allait en dire davantage... Daphné, saisie d'effroi, accélère sa fuite et laisse bien loin derrière elle Apollon et ses discours inachevés. Elle fuit, et le dieu lui trouve encore plus de charme : le souffle du vent soulève les plis légers de sa robe entrouverte ; une brise légère fait flotter en arrière ses cheveux épars. Sa course éperdue ne fait qu'embellir sa beauté. […]  Ainsi voit-on Apollon et Daphné : l'impatience excite le dieu, la peur rend la nymphe toujours plus rapide. Mais Apollon est soutenu par les ailes de l'amour : il vole, il poursuit la nymphe sans relâche. Déjà, penché sur les épaules de la fugitive, il effleure du souffle de son haleine ses cheveux flottants. Daphné est à bout de forces ; elle pâlit et, brisée par la fatigue, elle tourne les yeux vers les eaux du Pénée.
— Mon père, je t'en supplie, viens à mon secours ! s'écrie-t-elle. Aide-moi ! s'il est vrai que les fleuves ont un pouvoir divin, délivre-moi par une métamorphose de cette beauté qui cause mon malheur !

À peine achevait-elle sa prière que Daphné sent ses membres s'engourdir ; une fine écorce enveloppe sa poitrine délicate; ses cheveux se changent en feuillage, ses bras s'allongent en rameaux ; ses pieds, tout à l'heure si rapides, prennent racine et s'attachent à la terre ; la cime d'un arbre couronne sa tête ; il ne reste plus d'elle-même que l'éclat de sa beauté passée. Cependant Apollon l'aime toujours : il pose sa main droite sur ce qui est désormais le tronc d'un arbre et, sous l'écorce naissante, il sent encore palpiter le cœur de Daphné. Ce sont de jeunes rameaux  qu'il enlace, au lieu des bras de la nymphe ; c'est du bois qu'il embrasse, mais l'arbre repousse ses baisers. Alors le dieu s'exclame :
— Ah ! puisque tu ne peux être mon épouse, du moins tu seras mon arbre ! Désormais et pour toujours, cher laurier, ton feuillage viendra couronner mes cheveux, ma lyre et mon carquois. De même que ma longue chevelure flamboyante conserve une éternelle jeunesse car elle n'est jamais coupée, de même, je le veux, la tienne sera faite d'un feuillage verdoyant qui ne se fanera jamais.
Apollon avait fini de parler. Alors le laurier inclina ses jeunes rameaux et agita doucement sa cime : c'était le signe de tête de Daphné, qui admettait enfin les faveurs d'Apollon.

Traduction Annie Collognat, livre de Poche jeunesse, 2007

 Notes :
 En grec le mot daphné désigne le laurier
 Pénée : fleuve père de Daphné
 Rameau : branche

1ère étape :
Lecture des deux premiers paragraphes par l'enseignant. Puis les élèves volontaires ou désignés prennent la suite.

2ème étape:
Répartition des élèves par groupes de 4. Ils doivent rechercher le vocabulaire difficile dans le dictionnaire dans un premier temps. Puis ils doivent noter leurs impressions de façon individuelle sur le texte et ensuite, en discuter entre eux. Chaque élève doit alors écrire individuellement un résumé du texte en 5 lignes maximum.

3ème étape:
Mise en commun collective à l'oral des résumés. L'élève ayant fait un résumé satisfaisant le dicte à l'enseignant qui l'écrit au tableau, corrigé et amélioré simultanément par les autres élèves pour travailler l'expression écrite.

4ème étape:

Questions de compréhension détaillée:

  1. Quels adjectifs pourriez-vous utiliser pour caractériser les personnages de Daphné et Apollon ? Justifiez vos réponses en citant les lignes du passage (travail en petits groupes pour un débat entre élèves)
  2. Comment Apollon essaie-t-il de séduire Daphné dans le 2ème paragraphe? Quelles « armes » utilise-t-il ?
  3. Quelle est la parade trouvée par Daphné pour échapper à l’emprise d’Apollon ? Quels sont les mots importants utilisés pour décrire cette parade ?
  4. Relevez quels éléments de la personne de Daphné se transforment et en quoi? 
  5. Comment pourriez-vous définir le schéma de cette métamorphose? (cause / résultat)
  • Mise en œuvre de la correction des questions de compréhension (noter les meilleures réponses des élèves au tableau, les élèves les prennent en correction dans leur cahier au fur et à mesure)
  1. Un « rapporteur » pour chaque groupe énumère les adjectifs trouvés : les noter au tableau. (Rassurer les élèves qui ont eu du mal à trouver des adjectifs: cela fera l'objet d'une séance d'étude de la langue après cette séance). Une fois la mise en commun terminée, discussion avec les élèves sur la pertinence ou non des adjectifs choisis.
  2. Apollon essaie de séduire Daphné par son discours. Il utilise un vocabulaire guerrier où dominent le thème de la puissance : « je suis le maître (à 2 reprises), mes flèches sont redoutables » mais aussi de l’impuissance : « qui m’a transpercé le cœur / impuissant pour moi-même / Hélas (2 occurrences) ». Il l’implore de reconnaître son amour pour elle : « Ah ! / Je t’en prie / apprends au moins à reconnaître celui qui t’aime ».
  3. Pour échapper au dieu de l’amour Apollon, la nymphe fait appel à son père le fleuve Pénée et attend un pouvoir naturel divin, pour combattre d’égal à égal avec Apollon. Elle le supplie de l’aider à subir une métamorphose (faire une parenthèse au tableau pour expliciter ce terme : leur demander de décomposer ce terme et sinon les aider : préfixe grec « meta » qui exprime le changement et racine du mot « morphê » : forme).  La métamorphose a lieu, Daphné se transforme en laurier. Ne pas imposer une seule interprétation, accepter toutes les interprétations d’élèves à partir du moment où elles sont justifiées et pertinentes. On peut cependant les guider si certains piétinent : combat amoureux permanent, revirement de situation, au final c’est l’Amour qui triomphe mais c’est Apollon qui utilise son pouvoir divin pour donner à la beauté de Daphné une dimension éternelle.
  4. poitrine de Daphné : recouverte d'une fine écorce / cheveux : feuillage / bras: rameaux / pieds : prennent racine / elle se transforme progressivement en arbre 
  5. pour échapper à Apollon, Daphné implore son père le fleuve Pénée de la métamorphoser par son pouvoir divin / la métamorphose aboutit, Daphné perd son aspect humain qui devient végétal. C'est alors qu'Apollon lui donne une dimension éternelle, Daphné se rend compte de l'authenticité de son  sentiment amoureux et accepte ses faveurs.

5ème étape : 
L'enseignant projette à nouveau les photos de la sculpture de la 1ère séance et demande aux élèves de vérifier si la métamorphose correspond bien à celle décrite dans cet extrait.

6ème Français Séquence Transformation Méthode Analyser une sculpture


Fiche méthodique :
Analyser une sculpture


Introduction :

  • Si ces éléments sont connus, préciser le contexte historique et le courant artistique dans lequel elle s’inscrit.
  •  Présentation rapide du sculpteur : son nom, sa nationalité, ses dates de naissance et décès (si mentionnés), le courant artistique auquel il appartenait, etc.


Identification de la sculpture :

  • Nom et date de réalisation de la sculpture.
  •  Lieu où la sculpture est exposée : musée, parc, jardin, etc. et si possible nommer ce lieu précisément
  •  S’agit-il d’une commande à un artiste et si oui, qui a été le commanditaire et pourquoi ?


Description générale de la sculpture :

  • Sa nature : est-elle de type figurative (il est facile de voir de quoi il s’agit) ou abstraite (au contraire, difficile de reconnaître quoi que ce soit) ?
  •  Son sujet : s’agit-il d’un portrait, d’une allégorie, d’une divinité, d’un animal, d’un personnage de sexe masculin, féminin, indéterminé ?
  •  Y a-t-il un élément unique ou plusieurs éléments ?
  •  Si c’est possible de le déterminer, est-ce un sujet de type sacré (qui a un rapport avec la religion) ou profane (qui n’a aucun rapport avec la religion).
  •  Ses dimensions : Si ces éléments sont connus et identifiables, préciser la hauteur de la statue (et l’effet recherché sur le spectateur), s’il est possible de la voir sous différents angles, si on peut la voir de près ou de loin…
  • La technique utilisée et son matériau : marbre, bronze, pierre, terre cuite, etc. ?
  • Type de la structure : haut relief, bas relief, ronde bosse, etc.


Description analytique de la sculpture :

  • Sujet : Si c’est une personne, décrire son corps, sa nudité, ses vêtements, etc. Si c’est une allégorie, expliquer les différents symboles et leur signification. Si c’est une œuvre abstraite, décrire les formes et leur sens.
  •  Composition et lignes de force (lignes directrices) : Composition : Est-ce une composition en pied (personnage entier), d’un buste (coupé à mi-corps, de la poitrine au visage), d’une tête, etc. Lignes de force : Sont-elles horizontales, verticales, diagonales ? Donnent-elles une composition pyramidale, dynamique, statique ? Ces lignes sont-elles des courbes ou des droites ?
  •  Structure de l’œuvre : S’agit-il d’une structure dense ou lâche (avec des vides) ?


Interprétation de la sculpture :

  • Quels sont les effets voulus par le créateur, les sentiments qu’il cherche à véhiculer (autrement dit, comment réagit-on à la vue de cette œuvre ?) ?
  • Comment décrire et interpréter les expressions du/des visages, les postures, la gestuelle, les mouvements, les drapés et les plis des vêtements ? Quels sont leur signification ?
  • Que peut-on en déduire sur la portée de cette œuvre ? Que peut-on deviner du message possible voulu par le créateur ? 



Exemples de lignes de force en peinture (lignes directrices) :


































Source des dessins : http://artsplastiques.camus.jarville.over-blog.fr/pages/la-composition-2576340.html

6ème Français Séquence Transformation 1ère séance


Séquence : Transformation et identité

Séance 1 :

Objectif : Découvrir et analyser une sculpture
Outils : Fiche méthodique « Analyser une sculpture »
Support : Photos de la sculpture de Gianlorenzo Bernini (Le Bernin), 1622-23




(sources des photos : dekadensmagazinet.wordpress.com / imagiva.com)


Cette séance vient introduire le thème de la métamorphose dont il va être question tout au long de la séquence. Il s’agit également d’anticiper sur l’extrait des Métamorphoses, d’Ovide dont il sera question dans la séance suivante (les 2 personnages de la sculpture sont en effet les mêmes que dans l’extrait d’Ovide).

Ne pas leur donner le nom de la statue (Apollon et Daphné) car certains élèves connaîtront sans doute le dieu Apollon et cela faciliterait alors leur réponse à la question sur l’identité des 2 personnages.

Les 2 photos choisies de la sculpture de Bernini permettent de voir l’ensemble de l’œuvre sous 2 angles différents dont un gros plan sur les visages des 2 personnages pour rendre son interprétation plus aisée. Ces photos  sur transparent sont projetées au tableau / ou par un vidéoprojecteur (photo trouvée sur Google Images). Si la photocopieuse du lycée est de bonne qualité, les imprimer également pour que les élèves les collent dans leur cahier.

1ère étape : Laisser un moment les élèves découvrir en silence l’œuvre pour s’en imprégner.  

2ème étape : Leur demander leurs impressions premières: j’aime / je n’aime pas… mais en justifiant leurs réponses à l’oral.

3ème étape : Que représente cette sculpture ? Selon vous, qui sont ces deux personnages ?  Noter leurs hypothèses d’ interprétation au tableau au fur et à mesure. A la fin de cette activité orale, prendre une photo des remarques des élèves sur le tableau pour en garder une trace exploitable à la fin de la séance 2 sur les Métamorphoses d’Ovide. 

4ème étape : D’après vous, quels sont les éléments les plus importants si l’on veut analyser correctement cette sculpture ?

  • Distribution de la fiche méthodique « Analyser une sculpture ». 

Lecture et explication de cette fiche méthodique puis activités d’écriture :

  1.   En prenant appui sur la fiche méthodique, comment décririez-vous les différents éléments de cette sculpture (de haut en bas) ?
Les chevelures, les expressions des visages, les rameaux de laurier qui prolongent les doigts de la femme (attention à ne pas nommer Daphné), les postures et ce qu’elles indiquent : mouvement de l’homme vers la femme (de la même façon veiller à ne pas nommer Apollon !), son  corps en mouvement contraste avec celui  immobile, comme pétrifié de cette dernière dont les jambes recouvertes de bois prennent racine progressivement,  la semi-nudité des corps (expliquer aux élèves que le nu en art est un thème récurrent, qu’ils doivent s’y habituer et comprendre son sens), glorification de la beauté éternelle…

  •   Mise en commun orale des réponses de certains élèves. Ceux qui le préfèrent peuvent me rendre leur travail pour une correction individualisée.

    2.  Imaginez ce qui a pu arriver à ces deux personnages en écrivant un texte de 10 à 15 lignes (100 à 150 mots). Vous introduirez des verbes et expressions d'opinion (je pense que... / à mon avis...etc. ). Utilisez un dictionnaire pour vérifier l'orthographe!

S’ils n’ont pas le temps de finir en classe, leur demander de finir impérativement ce travail chez eux pour la prochaine séance et dans ce cas, relever le travail de ceux qui le souhaitent pour une correction individualisée. Les photos de cette statue seront accessibles sur leur session informatique pour qu'ils puissent y accéder depuis le CDI.




6ème Français Séquence Transformation Introduction


Séquence : Transformation et identité


Introduction :

Cette séquence de français pour la classe de Sixième s’inscrit dans le programme tel qu’il est défini dans le Bulletin Officiel du 28 août 2008. Des époques sont « privilégiées » pour chaque niveau, en l’occurrence l’Antiquité et les contes et récits merveilleux, notamment, pour le niveau Sixième.
La séquence Discours et transformation prendra donc appui sur les lectures analytiques d’un extrait du long poème Les Métamorphoses, d’Ovide, de la fable de La Fontaine La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le boeuf  et enfin d’un extrait de La barbe bleue, de Charles Perrault.  Ces œuvres font du reste partie des lectures suggérées par ce même B.O.

En préambule à cette étude, la première séance présentera aux élèves des photos d’une sculpture célèbre de Bernini: Apollon et Daphné (les personnages dont il est question dans l’extrait des Métamorphoses de la 2ème séance). Outre la découverte d’une œuvre artistique majeure, cette séance visera à les initier à l’analyse d’une sculpture par la distribution d’une fiche méthodique. Les instructions officielles pour la classe de français stipulent en effet que « la lecture des images, fixes ou animées, contribue également à la fondation d’une culture humaniste. Elle favorise la compréhension des œuvres littéraires étudiées en privilégiant des prolongements artistiques […] ».

La séance 2 fera l'objet d'une étude analytique et introduira la séance 3 d'étude de la langue qui aura pour objectif de montrer en quoi les adjectifs qualificatifs (étude de la langue) participent au thème de la transformation.

La séance 4 prendra appui sur un extrait du conte La Barbe Bleue, de Perrault pour une activité d'étude de la langue où les élèves étudieront les conditions d'emploi des temps de l'imparfait et du passé simple dans le récit. Un travail d'écriture évaluée (à faire à la maison) sera proposé aux élèves où ils devront imaginer la fin de l'histoire en introduisant une métamorphose et en utilisant des adjectifs qualificatifs appropriés et des verbes à l'imparfait et au passé simple.

La séance 5 sera l’objet d’une dictée (extrait de La Métamorphose, de Kafka) où seront particulièrement évalués les adjectifs qualificatifs et l'emploi des verbes à l'imparfait et au passé simple.

La séance 6 enfin proposera aux élèves de réaliser une synthèse écrite collective. Cela se fera après une étape de réflexion sur les thèmes de la transformation et de l'identité (thème général de la séquence) à travers une étude comparée des deux textes d'Ovide et de La Fontaine étudiés dans cette séquence. 


  • Il peut être également judicieux de prolonger cette séquence par une collaboration avec le professeur d’arts plastiques afin d’illustrer leur production écrite sur la fin de La Barbe Bleue. Si un tel travail n’est pas envisageable, il est possible de demander aux élèves de finaliser un document Word agrémenté de leurs dessins personnels ou pour ceux qui n’ont pas de facilité dans ce domaine, de prévoir des dessins évoquant des métamorphoses trouvés sur Internet. 
  • Une séance sera également prévue pour une correction approfondie du devoir à faire à la maison. 

vendredi 28 décembre 2012

Rapport de stage: Atelier Média-Langues


Les outils numériques au service des activités langagières

Stage assuré par K. C. au Lycée Maine de Biran,
Bergerac, le 30 novembre 2010


K. C. est professeur d’anglais au Lycée Pape-Clément de Pessac. Elle fait aussi partie du CATICE (Centre Académique aux TICE) où elle est chargée de mission dans l’académie pour l’accompagnement des établissements à la mise en place des dispositifs d’apprentissage des langues vivantes et notamment, des Ateliers Médialangues. Financé en grande partie par le Conseil Régional, un Atelier Médialangues 
comprend :
10 ordinateurs fixes, 10 casques audio (avec micro intégré)
1 mallette iPod avec un ordinateur Mac, 10 iPod (de type Nano avec micro intégré), 10 casques audio
1 mallette wifi de 8 à 10 netbooks
1 imprimante
1 visualiseur
D’autres équipements sont nécessaires mais restent à la charge de l’établissement.
L’Atelier Médialangues a pour objectif d’aider l’enseignant de langues dans ses pratiques pédagogiques. Les 5 activités langagières définies dans le CECRL peuvent en effet y être pratiquées simultanément, l’enseignant répartissant les élèves dans les différents pôles que sont :

  • Le pôle de compréhension orale
  • Le pôle d’expression orale
  • Le pôle vidéo collective
  • Le pôle vidéo individuelle
  • Le pôle expression orale en interaction (ou éventuellement expression écrite)


  • Pôle Compréhension orale

Il permet à l’enseignant de faire travailler ses élèves de façon individualisée, contrairement au Tableau Numérique Interactif qui repose sur une approche collective. Dans ce pôle,  l’élève se trouve devant un ordinateur, un casque (pourvu d’un micro) sur les oreilles. Il écoute un fichier audio (de type MP3 par exemple) déposé au préalable par l’enseignant sur le réseau interne du lycée. Il peut également écouter un CD ou une « fausse vidéo », que l’on nomme ainsi parce que c’est plus le son que l’image qui est mis en avant.  
Avantage du casque pour l’élève : une concentration supérieure car aucun bruit parasite, aucun bavardage ne vient le perturber. Madame C. tient à souligner l’importance de choisir des casques de bonne qualité. Dans de nombreux établissements, les restrictions budgétaires font que la tendance est à l’achat de matériel peu onéreux. Il existe des casques à 20 euros avec micro intégré amovible mais la partie micro est très fragile et devient très vite hors d’usage, ce qui nécessite d’acheter de nouveaux casques très rapidement… Dans son lycée, Madame C. utilise depuis environ une dizaine d’années des casques de très bonne qualité (à environ 80 euros l’unité), avec micro intégré non amovible. Cet équipement ne s’est pas détérioré avec le temps.
Avec la possibilité de transférer des fichiers audio sur la session des élèves, l’enseignant doit savoir transformer des documents en fichiers numériques pour une compatibilité totale avec l’atelier médialangues. 
Pour transformer des cassettes audio en fichiers de type MP3, il suffit d’avoir un magnétophone, un câble double jack (avec 2 prises mâles) et le logiciel  Audacity, téléchargeable gratuitement sur Internet. Ce logiciel, très intuitif, permet également d’améliorer  la qualité du son.  Après avoir placé la cassette dans le magnétophone, il faut relier ce dernier à l’ordinateur par le biais du câble (dans la fiche rose de l’ordinateur). Ensuite il faut ouvrir le logiciel Audacity et commencer la lecture de la cassette. Une touche du logiciel permet d’enregistrer directement.
Pour transformer des cassettes VHS, il existe un pack comprenant un câble convertisseur et un logiciel. On peut notamment en trouver sur le catalogue de vente par correspondance L’Objet du mois (objetdumois.com) pour un prix de 49 euros. Suite à ma demande d’informations complémentaires, il s’avère que le logiciel n’est malheureusement pas compatible avec Windows 7.
Pour être complet, il faut également ajouter qu’il est possible de transformer des pistes de CD et de DVD en fichiers numériques au format MP3 avec le logiciel Format Factory, là aussi téléchargeable gratuitement sur Internet.
Bien évidemment, il est également possible de travailler la compréhension orale à travers des vidéos du Web mais le fonctionnement « en direct » sur Internet est souvent rendu difficile par la saturation du réseau Internet du Rectorat sur lequel tous les établissements scolaires sont connectés. Lorsqu’il n’y a pas assez de débit, lancer une activité de ce type s’avère périlleux. Dans certains établissements cependant, des enseignants parviennent à convaincre les Services de l’Intendance et de l’Administration du bien fondé d’un abonnement Internet privé. Si cela n’est pas possible, l’enseignant peut télécharger une page internet par le biais du logiciel Video Download Helper (une fois encore téléchargeable gratuitement sur le Web). Bien noter cependant que les fichiers téléchargés sont de format .flv lisibles avec VLC media player (lecteur gratuit téléchargeable sur Internet).
Pour conclure cette partie sur le pôle compréhension orale, voici une liste de sites internet très intéressants sur un plan pédagogique :
http://www.cafepedagogique.net (où une rubrique langues est alimentée régulièrement)
http://profdespagnol.blogspot.com/ (pour les professeurs d’espagnol)
http://www.audio-lingua.eu/?lang=en (où l’on peut trouver des fichiers MP3 en anglais, allemand et espagnol)
A signaler enfin : en tapant les mots « crossing over » suivi de « ESL » (English as a Second Language) dans un moteur de recherches, on obtient une multitude de sites internet dont certains comportent des documents très intéressants pour la classe de langues vivantes.

  • Pôle Expression orale en continu

Pour la prise de parole en continu et en interaction (ces 2 compétences sont évaluées à l’épreuve ponctuelle finale ainsi qu’au CCF du Bac Pro 3ans), disposer d’un Atelier Médialangues est un atout considérable pour un lycée professionnel. Pour illustrer son propos, Madame C. nous donne une information surprenante : une étude a démontré que de la 6ème à la Terminale, un élève en classe d’anglais (sans équipement particulier) aura parlé en moyenne  7 minutes en tout et pour tout!
Dans ce pôle, l’enseignant utilise  principalement la malette contenant les 10 iPod de type Nano avec micro intégré, comprise dans le pack de l’Atelier Médialangues. Le logiciel Audacity est également utile à ce stade. Il permet de transformer ou de sélectionner seulement un extrait d’un fichier son.
Recommandation utile lorsqu’on utilise ce logiciel : après avoir appuyé sur la touche Stop, on doit recliquer sur l’endroit exact où l’on s’est arrêté pour enregistrer à nouveau, sous peine d’effacer totalement la piste qui vient d’être enregistrée ou  de superposer 2 pistes audio l’une sur l’autre. Ce problème est évité si l’on appuie directement sur la touche Pause, qui permet de repartir du même point pour continuer l’enregistrement. Une fois que celui-ci est terminé, faire un clic gauche sur fichier / exporter en Wav ou en MP3 (moins « lourd »). Puis choisir un fichier de destination / nom du fichier (s’assurer que l’élève indique bien son nom !) et transférer dans P (serveur profs du réseau du lycée). Lorsque les fichiers sont bien enregistrés dans P, une fenêtre apparaît avec un message « enregistrer les modifications », attention de bien cliquer sur NON.
Les fichiers audio enregistrés par les élèves sont alors accessibles à l’enseignant qui peut les corriger comme bon lui semble en dehors de la classe. Pour récupérer ces fichiers, il convient d’aller dans Poste de Travail / T (avec le nom de l’enseignant) / Liens / Partage. Attention : les élèves ont également accès au dossier Partage et peuvent donc à tout moment modifier leurs productions depuis un autre poste informatique dans l’établissement. Ce problème disparaît avec le nouveau système  Remise Prof  mais c’est alors un dossier commun à l’ensemble de l’équipe pédagogique.
Quelques exemples d’applications  du logiciel Audacity :
Fonction Couper (symbolisée par des ciseaux) : permet d’effacer un morceau de l’enregistrement effectué par l’élève, par exemple.
Fonction Générer / Silence : permet d’effacer certains mots d’un enregistrement audio pour créer un nouvel enregistrement avec des blancs (équivalent d’un texte à trous à l’écrit). Avec cette fonction, il est également possible de ménager des mini-pauses dans l’enregistrement, afin par exemple de former des groupes de sens qui vont faciliter la compréhension orale (pause après groupe nominal, verbal, etc.).
Fonction Effet / Changer la vitesse : déplacer le curseur soit vers la gauche (pour ralentir) soit vers la droite (pour accélérer). Cette fonction est particulièrement utile lorsque le locuteur parle à un rythme trop rapide pour les élèves.
Fonction Effet / Normaliser : permet d’enlever certains sons parasites et d’améliorer la qualité du son.
Pour importer un fichier dans Audacity : clic sur Projet / importer audio / ouvrir
Pour exporter un fichier son sur lequel l’élève a travaillé, cliquer sur Exporter.
Le pôle d’expression orale prend tout son sens avec  les nouvelles directives pour les langues vivantes qui consacre la primauté de l’oral. Pour l’enseignant, l’utilisation de ces différents outils facilite l’évaluation de l’élève et permet par la même occasion de lui donner  une correction individualisée de ce qu’il faut améliorer.

  • Pôle Vidéo

Une vidéo sur DVD ou Internet peut tout à fait être abordée de façon collective avec l’outil tableau numérique interactif. Si l’on souhaite que l’élève travaille de façon plus active et plus personnelle, là encore l’atelier médialangues offre une solution appropriée.
Un logiciel très pratique pour travailler sur une vidéo est Movie Maker qui figure sur tous les PC. Cependant il est bon de noter que ce logiciel n’accepte que les fichiers de type .wmv . Si le fichier est d’un format autre, il convient là encore d’utiliser le logiciel Format Factory. Pour ce faire, la procédure à adopter est la suivante : clic sur « tout type vers WMV » et la conversion se fait directement. Cette opération est particulièrement recommandée dans le cas d’un fichier .wmv qui sera très lourd et prendra de la place sur le disque dur. En passant par Format Factory, il est aisé de convertir ce type de fichier en MP3 ou MPEG4.

  • Pôle Expression orale en interaction

Des activités peuvent être organisées par l’enseignant qui répartit ses élèves autour d’un espace comprenant une table ronde (afin de faciliter les échanges) et des chaises. Il est important ici de donner le rôle de rapporteur à un élève qui rendra compte aux autres groupes des productions réalisées.

Quelques remarques utiles en conclusion :

  • Madame C. a volontairement privilégié certains aspects de l’Atelier Médialangues. Le stage comportait en effet deux journées de formation auparavant et une seule maintenant.
  • Dans un atelier médialangues, il est bon d’essayer de placer chaque groupe d’élèves en autonomie. L’enseignant passe alors de groupe en groupe pour s’assurer que tout fonctionne normalement.
  • L’atelier médialangues semble au départ un outil un peu complexe à gérer pour certains enseignants. Mais bien souvent, une fois que le fonctionnement est intégré, il se retrouve victime de son succès et il importe alors de réaliser un planning de réservation le plus juste possible. Dans son lycée, Madame C. établit un planning libre jusqu’aux vacances de la Toussaint. Les enseignants réservent au fur et à mesure des créneaux en fonction de leurs besoins pédagogiques avec telle ou telle classe. Puis, au retour des vacances de Toussaint, les enseignants font des vœux, comme pour un emploi du temps normal, et un emploi du temps « fixe » est créé avec des créneaux attribués aux enseignants pour ses classes. L’emploi du temps peut ensuite être modifié en février, de façon à permettre à d’autres classes d’avoir accès à l’atelier médialangues.
  • La maintenance de l’atelier médialangues est un aspect fondamental pour son bon fonctionnement. Il est donc recommandé d’essayer de trouver un collègue qui veuille bien s’en charger. Comme cette tâche peut s’avérer fastidieuse, il est essentiel de négocier une décharge horaire ou une HSA avec l’Administration. Il conviendra ensuite à l’enseignant désigné de veiller aux éventuels dysfonctionnements, pannes, etc. 
  • Prévoir dans la salle choisie pour l’implantation de l’Atelier Médialangues, un endroit où on peut facilement recharger les iPod.
  • Il ne faut pas s’inquiéter si l’on n' utilise simultanément que 2 pôles par séance dans l’Atelier. Par expérience, Madame C. nous indique qu’il est extrêmement rare d’utiliser les 5 pôles à la fois, chose très difficile à gérer pour un enseignant.
  • Une fois l’Atelier implanté dans l’établissement, Madame C. vient proposer un accompagnement pédagogique à l’ensemble de l’équipe des enseignants de langues vivantes.


Nota Bene :
Ce stage m’a convaincu de l’intérêt pédagogique que représenterait un Atelier Médialangues pour notre établissement, notamment pour l’entraînement de nos élèves aux compétences d’expression orale en continu et en interaction.  A la fin de cette journée de formation, j’ai fait part à Madame C. de mon souhait de déposer un dossier de demande d’attribution d’un Atelier Médialangues au Lycée Jean Capelle. Monsieur V., Proviseur et Monsieur B., Proviseur-Adjoint m’ont donné leur accord.

Jean-François Lermé, coordonnateur de la section d’anglais

Ma vision du métier (3ème partie) : Diversité


Ce qui fait la richesse de ce métier, c'est le renouvellement permanent des situations d’apprentissage. Aucune séance de cours ne ressemble à une autre, heureusement et malheureusement parfois !  Cette diversité vaut pour les cours, elle vaut également pour nos pratiques de classe.

Depuis quelques années, avec l'avènement des nouvelles technologies, nous sommes nombreux à avoir compris que le multimédia pouvait offrir des améliorations considérables de nos pratiques pédagogiques.

C’est fort de cette conviction que j'ai eu la chance d’être coordonnateur pédagogique pour l'anglais en 2010-11 et qu'à ce titre, j'ai piloté avec succès (en collaboration étroite avec ma collègue d’espagnol) un projet de mise en place d'un Atelier Média-Langues dans mon établissement de l'époque .

Après avoir suivi un stage de formation continue sur « le numérique au service des activités langagières », cet espace de travail s'était en effet imposé à moi comme un outil indispensable pour la mise en pratique de l'approche actionnelle pour les langues vivantes, au cœur des instructions du Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues (CECRL).

Les nombreuses possibilités qu'il offre, notamment pour la compréhension et la production orales, sont décrites dans un rapport de ce stage, que j'avais adressé aux professeurs de langues (anglais, espagnol, allemand) pour les informer de mon souhait d'introduire cet outil dans notre lycée. Ce rapport fait l'objet d'un document à part sur ce blog sous le titre « Rapport de stage Atelier Média-Langues ».

En outre, si l'établissement possède un caméscope numérique, je trouve également intéressant de filmer régulièrement les élèves dans leurs productions orales, afin notamment de les aider à améliorer leur savoir-faire dans cette compétence. Il est effectivement plus simple pour un élève de constater ce qu'il réussit à faire et ce qu'il convient d'améliorer lorsqu'il voit lui-même le résultat de sa propre prestation sur un écran.

Les activités de classe en anglais, si elles ont tendance maintenant à accorder une importance prépondérante à l'oral, ne négligent pas l'écrit pour autant. Ici aussi le multimédia peut s'avérer être un prolongement intéressant. J'apprécie particulièrement la possibilité de créer des blogs de classe, que ce soit en classe de français ou d'anglais, afin de favoriser l’expression écrite des élèves. Le fait de pouvoir être lu par un grand nombre de personnes motive en effet davantage des élèves que le simple fait de rendre un travail à un enseignant qui n'en sera que l'unique lecteur ! C'est donc toute la communauté pédagogique mais aussi les parents d’élèves, qui sont susceptibles de bénéficier de la richesse de ces travaux, les blogs pouvant facilement être accessibles par des liens sur le site officiel de l'établissement.

Une autre activité de production écrite que je trouve particulièrement motivante pour les élèves est la création d’un « roman photo » et dans ce cas, il s'agit simplement d'utiliser un appareil photo numérique. Les élèves imaginent un scénario ayant pour cadre leur établissement ou son proche environnement (mais on peut également imaginer cette activité à la suite d'une sortie scolaire). Ils peuvent alors prendre des photos en fonction de ce scénario. Après sélection des meilleures photos, ils les commenteront en français ou en anglais, par l'introduction de bulles notamment (faisant ainsi parler les élèves de la classe). Ce type d'activités peut donc donner un côté ludique à un compte-rendu de sortie scolaire ou de voyage à l'étranger et motiver davantage les élèves qu'un simple rapport sous forme de document Word.

Le multimédia offre des possibilités infinies à l'enseignant aujourd'hui. Il parvient à motiver davantage les élèves et à les insérer davantage dans la société actuelle où le numérique règne en maître. Par la diversité qu'il autorise, il nous donne aussi un moyen précieux d'imaginer des pratiques pédagogiques nouvelles et donc de nous éviter une routine sclérosante.


Ma vision du métier (2ème partie) : Adaptabilité


Depuis la fin de mes études universitaires, j’ai connu des expériences très diverses qui ont toutes contribué à la prise de conscience d'un paramètre qui me paraît fondamental dans le métier d’enseignant aujourd’hui : l’adaptabilité.

Que ce soit dans ma fonction d’assistant de français dans un lycée anglais à Londres en 1990 (mes premiers pas dans le métier d’enseignant), dans celle de formateur en anglais dans une école de commerce à Bordeaux, dans mon métier d’enseignant de français et d’anglais dans des lycées professionnels en ZEP à Marseille et dans la banlieue bordelaise, dans mes missions pédagogiques au Centre Pénitentiaire des Baumettes à Marseille ou avec des élèves de lycée général ou de BTS avec le GRETA dans cette même ville, ou lors des expériences plus récentes d’enseignant d’anglais dans un lycée hôtelier de Bergerac ou encore de documentaliste-assistant dans un lycée de Périgueux, j’ai pu mesurer l’importance de cette notion d’adaptabilité.

J’ai réellement pris beaucoup de plaisir à vivre ces expériences très différentes les unes des autres, même si parfois certaines étaient particulièrement exigeantes sur le plan nerveux. A chaque fois, j’ai eu l’impression d’apprendre un nouveau métier ou du moins de le redéfinir en fonction du public que j’avais en face de moi. J’ai été sensible à l’environnement et à la façon dont il influe sur notre personne. Pas toujours de façon positive, surtout au début… Il m’a fallu trois bonnes semaines pour m’habituer aux nombreuses grilles fermées,  aux odeurs pestilentielles et à mon ancienne cellule reconvertie en salle de cours improvisée à la prison des Baumettes. Il m’en fallut moins pour prendre mes repères dans l’immeuble bourgeois d’une école de commerce du Cours du Chapeau Rouge à Bordeaux.

Des lieux différents qu’il faut s’approprier, des apprenants différents aussi, bien évidemment.  On ne s’adresse pas de la même façon à des enfants de bonne famille de la bourgeoisie bordelaise et à des détenus purgeant une longue peine dans un centre pénitentiaire. Sans aller jusqu’à ces extrêmes, on n’enseigne pas de la même façon à des élèves de ZEP d’une grande agglomération et à des élèves d’un lycée en zone rurale. Les anglo-saxons utilisent un terme que j’apprécie particulièrement : le background. En français, il faut plusieurs mots pour le définir : ce sont tout à la fois les antécédents, le passé de la personne, son cadre de vie, son milieu socio-culturel.  Prendre en compte ce background, c’est adapter son discours pour que le message puisse passer plus efficacement.

J’ai parlé dans un article précédent de l’importance pour moi de la dimension humaine dans la relation pédagogique. Enseigner de façon efficace c’est donc également adapter sa propre communication au public auquel on s’adresse. Lors de discussions passionnées en salle des profs, j’ai entendu parfois certains enseignants dire « c’est aux élèves de s’adapter à moi, pas l’inverse ! ». Si je peux (essayer de) comprendre cette posture, je ne la partage pas vraiment. Il ne s’agit pas de pratiquer autant de discours différents qu’il y a d’élèves dans une classe, c’est bien sûr matériellement impossible. Il s’agit plutôt de « sentir » le climat de la classe, d’observer les comportements des élèves et de définir différents types de profils (l’élève meneur ou l’élève passif, l’extraverti ou l’introverti, le sérieux ou le dilettante …).

Mon expérience me fait dire qu’il est plus aisé de motiver les élèves lorsqu’on a déterminé ces profils et que l’on sait donc comment s’adresser à eux. Il ne me semble pas pertinent de parler de la même façon à tel ou tel élève qui rechigne à se mettre au travail. En pareil cas, si l’on se doit d'être exigent de la même façon avec tous les élèves, par souci d’équité notamment, il sera plus judicieux d’adapter le ton de sa voix selon que l’élève est timoré ou volubile, par exemple.
J’entends souvent des collègues me dire : « on n’est pas là pour jouer le psy ! ». Certes. Mais comprendre les fonctionnements différents de nos élèves, ce n’est pas à mon sens « jouer le psy ». C’est simplement apprendre à mieux les connaître pour rendre notre message plus efficace et donc être plus performant dans notre mission d’enseignant. Il m’est arrivé d’être fatigué ou dans un "jour sans" et de ne pas pouvoir faire l’effort d’adapter mon discours en fonction des groupes d’élèves d’une classe. Le résultat est quasiment toujours contre-productif. Vouloir « passer en force » ne marche pratiquement jamais. Au pire, on obtient un climat de classe tendu et l’on s’épuise nerveusement, au mieux, on rend la classe complètement passive. Dans les deux cas, le cours n’aura servi à rien ou presque. Adapter son discours, c’est donc favoriser un climat de travail dans la classe, à fortiori lorsqu’il y parfois des résistances à l’acquisition du savoir.

Le savoir, c’est bien de cela dont il s’agit. La question qu'un grand nombre d’enseignants se posent aujourd'hui est souvent celle-ci : à l’heure des nouvelles technologies - où un élève malin pourra cliquer sur son smartphone (dissimulé dans sa trousse bien sûr) pour obtenir illico une information ou une traduction sur internet – détenons-nous encore ce savoir de la même façon que nos pairs il y a ne serait-ce qu’ une trentaine d’années ? La réponse est NON, bien évidemment. Si l’ordinateur nous rend notre vie d’enseignant et de citoyen infiniment plus facile, il permet aussi aux élèves de contourner la personne du maître pour avoir accès au savoir.

Il s’agit donc pour l'enseignant d'aujourd'hui non seulement de s'adapter à différents publics mais également d'adapter son métier aux nouvelles exigences imposées par l’ère du multimédia. Cela fera l’objet d'un troisième et dernier article sur ma vision du métier d'enseignant, intitulé "Diversité".

mercredi 26 décembre 2012

Ma vision du métier (1ère partie): Humanité


On parle très souvent (trop ?) de pratiques pédagogiques, de stratégies d’apprentissage, de savoir-faire. Ils sont effectivement au cœur du métier d’enseignant. Mais enseigner c’est également participer à une relation humaine dans laquelle notre vécu, notre personnalité et nos expériences vont nous permettre de favoriser la transmission de connaissances et de savoir-faire auprès de nos élèves.

Ma vision du métier d’enseignant est donc une synthèse des souvenirs de l’adolescent et de l’élève que j’ai été, des rencontres avec des professeurs qui ont laissé en moi une empreinte indélébile, des échanges et des projets menés avec d’autres collègues enseignants et enfin, des réactions d’élèves qui m’ont marqué, de façon positive (les réussites pédagogiques sont des cadeaux précieux, notamment dans les établissements « difficiles ») ou négative (les sportifs ont coutume de dire qu’on apprend souvent plus d’une défaite que d’une victoire, je crois qu’il en est de même pour les enseignants…).

Adolescent timide et parfois timoré, je n’imaginais alors pas un seul instant qu’un jour la chance me serait donnée d’être le point de convergence de dizaines de regards dans une salle de classe ! C'était sans compter sur le talent pédagogique et les qualités humaines de deux enseignants qui m'ont marqué pour toujours et auxquels il m'arrive encore régulièrement de penser.

Miss L. était ma prof d'anglais (on s'en serait douté) en classe de Sixième. Elle était sympathique, rayonnante et enseignait sa matière avec un enthousiasme communicatif. A cet âge-là, l'affect prend une place importante dans la relation pédagogique. Si je ne me souviens plus précisément de la teneur de ses cours, je me souviens en revanche avoir eu envie de lui faire plaisir et j'apprenais donc mes leçons avec beaucoup d'application.  Miss L. me gratifiait de regards et de sourires où je lisais sa reconnaissance. Sa personnalité rendait le climat de classe convivial. J'oubliais alors ma timidité maladive pour oser prendre la parole. Je mettais logiquement un point d'honneur à être le meilleur élève de sa classe.

Bref, Miss L. avait tellement bien fait son "job" que j’allais rapidement passer le plus clair de mon temps à écrire des lettres en anglais! Il existait en effet à l’époque un organisme finlandais chargé de trouver des correspondants. Pour moi qui habitais alors dans une ferme isolée du fin fond de la Dordogne, c’était une occasion inespérée de m’évader vers des horizons dont j’entendais déjà l’appel au voyage. J’eus bientôt une cinquantaine de correspondants partout dans le monde qui contribuèrent à leur façon à mes progrès en anglais et à me donner un goût prononcé pour la découverte des autres cultures.  Pour l’anecdote, le destin a voulu que je rencontre le dernier survivant de ces échanges épistolaires aux USA, à Seattle, au printemps dernier. Cela faisait 27 ans qu'on attendait ce moment-là !

Alors c’est toujours avec un souvenir ému que je repense à Miss L. et je lui suis reconnaissant de m'avoir transmis son amour ...de la langue de Shakespeare (bon, en l’occurrence pour moi à l’époque, c’était plutôt la langue des Beatles !).  

C’est en classe de 3ème que je fis une autre rencontre déterminante, qui allait encore plus bouleverser l’adolescent que j’étais alors : Mr F., enseignant de français, soixante-huitard à la barbe évidemment fournie et au caractère bien trempé.
Mr F. m’enseigna le goût des mots, me donna le courage d’oser rêver, m’apprit à remettre en question certaines convenances et à lutter contre les a priori. Dans l’exacerbation des sentiments adolescents, je me souviens l'avoir considéré comme un deuxième père, ni plus ni moins ! Il nous donnait des lectures qui nous faisaient voir le monde différemment, nous questionnaient, nous dérangeaient parfois et in fine, développait notre esprit critique. Je me souviens de son regard perçant et profond lorsqu’il nous écoutait -  et ses sempiternelles remarques lors de nos réponses à des questions de compréhension qui ne le satisfaisaient que partiellement… « oui et alors ? va plus loin… ». Ses exigences étaient telles qu'il en demandait toujours plus. C'est ainsi qu'il nous sermonnait aussi de façon virulente lorsque nous étions médiocres dans nos compositions écrites. Mais Mr F. s’intéressait surtout profondément aux élèves que nous étions et aux futurs citoyens que nous allions devenir.  Je me souviens encore d'une réflexion qu'il avait faite à mes parents lors d'une réunion Parents-Professeurs. Il avait su décrypter l'adolescent que j'étais bien davantage que mes parents à l'époque. Je l’admirais pour son ouverture d’esprit, son empathie, son envie de nous voir réussir notre vie. Nous étions en 1981, l’Histoire lui fit un clin d’œil qui a marqué toute notre génération.  

C’est peu dire que ces deux enseignants m’ont marqué à vie. Ils sont bien évidemment à l’origine de ma vocation à exercer ce métier et à l’exercer d’une certaine façon. C’est ainsi que j’ai compris très rapidement que « l’humain » était un paramètre fondamental dans la relation pédagogique. Lorsque j’ai été parachuté dans les quartiers sensibles de Marseille dès ma sortie d’IUFM, c’est « l’humain » qui m’a sauvé.

Il fallait faire preuve de bienveillance devant des élèves qui venaient de subir un échec souvent traumatisant au collège. Il fallait s’adapter au public, doser subtilement la fermeté et la souplesse pour se faire respecter et inspirer la confiance. Il fallait établir un climat de classe suffisamment serein et convivial pour que certains blocages à prendre la parole en anglais puissent disparaître.
Il fallait surtout s’intéresser aux élèves en tant que personnes, prendre en compte leurs attentes et leurs craintes, leurs goûts et leurs centres d’intérêt pour leur proposer des activités et des supports qui les motivaient. Ces 7 années d'expériences dans des lycées professionnels classés ZEP et « sensible » n’ont jamais été de longs fleuves tranquilles, bien évidemment, mais elles ont profondément façonné ma personnalité d’enseignant. 

Cependant, s'il est des enseignants qui m'ont marqué à vie de façon positive, il en est d'autres qui ont laissé chez moi des souvenirs douloureux. Je ne parlerai pas des profs de maths de l'époque qui avaient bien vite abdiqué devant mon peu d'appétence pour leur matière - au grand dam de mon père qui voulait faire de moi un scientifique! Il faut dire qu'à l'époque, la formule "ne laisser aucun élève au bord du chemin" n'était pas encore consacrée... on s'occupait davantage des bons élèves, les plus mauvais semblaient peu "doués" donc irrécupérables.

Non, je veux parler d'expériences plus récentes, de collègues avec qui je ne partageais pas la même vision du métier. A plusieurs reprises, l'opportunité m'a été donnée d'assurer la fonction de professeur principal. Lors d'une de mes affectations en ZEP, Madame B., la Proviseure de l'époque m'avait confié cette mission pour une classe de Baccalauréat Professionnel, ayant décelé en moi "des facultés pour anticiper et analyser les risques de conflits en classe", pour reprendre les termes de sa notation administrative de l'année précédente. Elle ne croyait pas si bien dire. Mr L. avait peu apprécié cette décision. En tant que professeur d'atelier, il enseignait une bonne dizaine d'heures de maintenance industrielle à sa classe et il estimait que cette mission lui revenait "de droit".

La première réunion de travail de l'équipe pédagogique fut donc assez tendue, Mr L. prenant systématiquement le contre-pied de mes propositions. Mais ce n'était qu'un avant goût... Mr L. avait pour habitude de pratiquer la brimade auprès de ses élèves. Il les "cassait" avec un plaisir non dissimulé et s'en vantait en salle des profs. Il estimait que l'autorité d'un enseignant passait par là, il fallait prendre le dessus, les humilier pour se faire respecter. Les enseignants qui respectaient leurs élèves, qui discutaient avec eux, qui essayaient de les comprendre et de désamorcer des situations difficiles étaient pour lui des "faibles". Ce qui devait arriver arriva.

Cette année-là, la classe de maintenance comportait quelques fortes têtes qui n'entendaient pas se soumettre à l'autorité abusive de Mr L. Parmi eux, un élève dont le père venait d'être placé en détention pour une sombre histoire de baston qui avait mal tourné. Je me souviens l'avoir vu régulièrement arriver en classe avec des cernes, la tête en vrac. Sa mère, une personne charmante, avait demandé à me rencontrer et m'avait fait part de son inquiétude pour son fils. J'avais prévenu l'ensemble de l'équipe, pensant qu'on ferait front commun pour "épauler" l'élève et lui redonner la motivation nécessaire pour ne pas décrocher de sa formation. Mr L. ne l'entendait bien évidemment pas de cette oreille. "On n'est pas là pour faire du social!", avait-il dit. Avec l'ensemble de l'équipe, on avait vainement essayé de lui faire comprendre qu'il s'agissait d'une période de mal-être de l'élève en question et qu'on se devait de tout mettre en oeuvre pour l'aider à passer ce cap. Au-delà de son cas particulier, c'était l'ambiance de classe qui pouvait s'en trouver affectée car l'élève en question était un "leader", dans le bon sens du terme parfois, dans le mauvais, souvent aussi. Peine perdue.

Et donc le pire arriva. Rapport de Mr L. du jeudi 20 janvier, cours de maintenance de 13h30 à 17h30: " ... J. n'a pas voulu se mettre au travail malgré mes mises en garde. Alors que j'écrivais au tableau, des boulons ont volé dans ma direction ... ce comportement est inqualifiable et j'attends des sanctions exemplaires...".
Convocation d'un groupe d'élèves dans le bureau de Madame B. Aveux de J. et de son meilleur ami, une semaine d'exclusion du lycée.
J'eus bien évidemment la version complète de l'histoire. J. était arrivé en cours épuisé, après avoir passé une nuit blanche. Plutôt que de "sécher" le cours, il avait fait l'effort de venir mais son entrain à se mettre au travail n'y était pas. Mr L. avait lourdement appuyé là où ça fait mal "Tu te mets au travail et vite! Ton père en prison c'est pas mon problème!". La suite, on la connaît.

J'étais consterné et dans une position intenable. Solidaire de mon collègue par la force des choses car on ne peut pas accepter qu'un enseignant subisse pareil traitement. Désolé pour J. et pour sa mère, qui m'avait appelé en pleurs. Alors je décidai d'écouter mon "instinct". En tant que professeur principal, je devais trouver une solution pour désamorcer une situation de classe explosive (les élèves ayant tous logiquement pris fait et cause pour J.) et pour permettre au même J. de ne pas décrocher. A son retour d'exclusion, je pris rendez-vous avec J. et sa mère. Je fis comprendre à l'élève que son objectif était de décrocher le Bac et qu'il devait le faire pour son père, argument qui fit évidemment mouche. Je lui dis aussi qu'il n'arriverait pas à changer Mr. L., qu'il devait s'adapter à son fonctionnement, comme il aurait à le faire peut-être avec un patron récalcitrant plus tard. Qu'il devait prendre sur lui pour ne pas être insolent et que sa plus grande victoire serait de montrer à l'ensemble de l'équipe pédagogique, à son père et à lui-même qu'il avait réussi à aller au-delà de ses épreuves pour parvenir à son but: l'obtention du Bac. Je lui proposai aussi de venir me voir si nécessaire à la fin de mes cours pour parler de ses doutes, de son comportement en classe, bref, pour faire un point régulier sur son attitude et sur son travail.

Lorsqu'on met en place un tel dispositif fondé sur "l'humain", on ne sait jamais comment les choses peuvent évoluer. Il suffit d'une étincelle parfois pour rallumer le feu qui couve. Il suffit aussi d'un déclic pour que les choses prennent un tour favorable. C'est ce deuxième scénario qui se produisit heureusement.
Les langues s'étaient déliées et j'avais maintenant toute la confiance des élèves. Lorsque Mr L. leur adressait ses habituelles brimades, je leur expliquais que c'était sa façon de fonctionner, qu'ils n'avaient pas d'autre choix que de s'adapter et de ne pas répondre à ses provocations pour éviter les sanctions. J'ajoutais que si Mr L. agissait de la sorte, c'était parce qu'il était exigeant avec ses élèves, parce qu'il voulait leur réussite (je n'en étais pas forcément convaincu mais j'avais utilisé des arguments qui se devaient d'être porteurs).
Depuis ce discours-là, la motivation des élèves dans mes cours de français et d'anglais faisait plaisir à voir.  L'année se passa sans autre accroc majeur. Les épreuves du Bac arrivèrent, je fis un petit clin d'oeil à J. croisé dans un couloir avant l'une de ses épreuves d'atelier à gros coefficient. Il me fit un sourire et m'adressa un regard que je devinai plein de reconnaissance.

Les résultats du Bac tombèrent quelques jours plus tard. J'avais décidé de me déplacer et d'accueillir mes élèves devant la porte d'entrée du lycée où les résultats seraient affichés. Alors que je discutais avec certains d'entre eux, je vis arriver J. et sa mère. Je pressentais que l'émotion serait à son comble quelques minutes plus tard. Cela se confirma lorsque Madame B. apporta la liste des reçus. Les résultats de la classe étaient bons, quelques élèves devaient passer le repêchage mais aucun n'avait été recalé. J. était reçu. Je le vis se diriger vers sa mère et l'enlacer. Quelques secondes plus tard, elle arriva vers moi, les yeux embués et me dit : "Je vous remercie du fond du coeur pour tout ce que vous avez fait pour J." J. arriva entouré de ses amis, me serra la main et dit simplement:  "Merci monsieur".
Je me souviendrai longtemps de ce moment-là. Au-delà de la satisfaction d'avoir participé à la remotivation et donc indirectement à la réussite de J., j'étais surtout heureux d'avoir su trouver les mots. J'avais fait un clin d'oeil à Miss L. et à Mr. F. Je leur devais bien ça.

L'humanité ou "l'humain", appelons cela comme on veut. C'est mon leitmotiv lorsque j'évoque le métier d'enseignant! Si j'aime passionnément ce métier, ce n'est pas uniquement par goût d' enseigner le français et l'anglais. C'est aussi pour des instants comme ceux que j'ai vécus avec J. cette année-là mais également avec une quantité d'élèves démotivés par l'école, cassés par la vie, fatalistes devant leur échec. Grâce à la prise en compte du facteur humain dans la relation pédagogique, on arrive à des résultats insoupçonnés parfois. Il n'y a pas que des succès bien sûr et le métier nous apprend à rester humble et à avancer à pas feutrés - la pédagogie n'est assurément pas une science exacte! Mais lorsqu'on parvient à des réussites comme celle de J., que ce métier est magnifique!